Crise énergétique : le vélo, avenir du VAE ?
Source : www.weelz.fr, le 26/07/2022
Un faisceau d’indices nous pousse à croire que le vélo est l’avenir du VAE (Vélo à Assistance Électrique). Comme nous sommes du genre à partager, voici ici les indices que nous avons collectés. Et souvenez-vous, vous l’aurez lu ici en premier. Weelz!, leader de Pignon, plus que jamais.
Un faisceau d’indices nous pousse à croire que le vélo est l’avenir du VAE (Vélo à Assistance Électrique). Comme nous sommes du genre à partager, voici ici les indices que nous avons collecté. Et souvenez-vous, vous l’aurez lu ici en premier. Weelz!, leader de Pignon, plus que jamais.
Indice 1 : électricité rare et chère. Et ça ne va pas s’améliorer
Il y a quelques jours nous vous parlions d’éco-pédalage. C’était un billet en réaction à une tribune parue dans le Journal du Dimanche dans laquelle les patrons des fournisseurs d’énergie nous enjoignaient à faire des efforts dès aujourd’hui (à une invitation du président Emmanuel Macron aussi à couper la wifi).
Cette prise de parole n’est pas tombée là par hasard. Qui est le mieux placé que les patrons d’EDF, Engie et TotalEnergies en France pour constater la tension qu’il y a sur la production d’électricité ? Cette tribune a pris de cours les politiques. Ils se sont fait couper l’herbe sous le pied par les patrons. Ils étaient chafouins les décideurs politiques. Comme si, quand il y a une annonce importante à faire, c’est leur pré-carré. En d’autres termes, ne nous volez pas la vedette. Nos politiciens nous préviennent 15 jours après. Bruno Lemaire nous précisait lors d’une conférence de presse ce samedi 9 juillet 2022 à l’occasion des Rencontres économiques d’Aix-en-Provence.
Si vous comptiez sur le nucléaire, faudra patienter… l’été prochain
C’est une lecture d’un article de La Tribune1 qui nous fait tilter. La Tribune n’est pas nécessairement un journal que l’on pourrait qualifier de complotiste. On peut y lire, “selon le réseau européen des gestionnaires de réseau de transport d’électricité ENTSO-E, 27 des 56 réacteurs du territoire se trouvent en effet à l’arrêt“. 27 sur 56 ! Donc oui quasiment 50% de nos réacteurs sont en maintenance. Bien joué l’anticipation. Sachant que notre mix énergétique, théorique, est nucléaire à 70%.
Le gaz à tous les étages, c’est fini
Le reste (éolien, gaz, pétrole… représente 30% de notre mix énergétique). Sauf que le gaz, il vient beaucoup de Russie. Et la Russie n’est plus notre amie. GazProm vient de couper l’Allemagne de son approvisionnement en gaz. Officiellement pour maintenance du NordStream 1 (le pipeline long de 1200 km qui relie la Russie et l’Allemagne). Cette coupure ou baisse des quantités envoyées touche aussi l’Italie, l’Autriche et la France. Évidemment, la crainte est bien que le robinet ne soit pas ouvert à nouveau2 tant que la guerre en Ukraine perdure (ou que Poutine est au pouvoir (l’un allant probablement de paire avec l’autre)).
Les prix flambent
Le prix du pétrole, vous le suivez à peu près. Quand même, au premier décembre 2021, le cours du Brent était à 75USD. Au 9 juillet 2022 il était à 105USD. Vous pourrez rétorquer que nous ne sommes pas très nombreux à charger les batteries de nos vélos à Assistance électrique à l’aide d’un générateur. Comme dirait Xavier “C’est pas faux“.
Filons donc regarder les prix de l’électricité. Et pour cela il y a la bourse EPEX3. Au 25 février 2021, le cours du Mégawattheure oscillait autour des 45€. Le 12 juillet 2022 il était a 432€. Et ça c’est pour le prix SPOT (pour l’achat là maintenant). Les prix sur le marché du forward (au hasard fin de l’automne 2022), le MWh se négocie autour des 800€ (si l’on en croit la Tribune, cf lien vers l’article en pied de page).
Conclusion sur l’indice 1 :
L’énergie se fait rare, l’énergie se fait chère et ça ne va pas aller en s’améliorant tout de suite. Si nous sommes face à des restrictions ou pénuries d’électricité, il va falloir faire des choix. Courageux, comme le dit Bruno Lemaire : “Il va falloir faire des choix courageux, […] nous ne pourrons pas continuer à nous chauffer et à nous déplacer comme si de rien n’était”. Charger la batterie de son téléphone ou manger cru ? Se laver à l’eau froide ou sacrifier l’assistance de son moteur électrique sur son bicloune ? Un choix courageux, c’est peut-être de se déplacer à vélo musculaire plutôt qu’assisté par une batterie.
Indice 2 : Pénurie de composants électroniques
Il n’y a pas si longtemps, nous avions le privilège de visiter une usine d’assemblage de biclounes. Ce fabricant propose au catalogue exclusivement des VAE. C’était en mai 2022. C’était beau tous ses postes de travail. Tous ses cartons d’un côté de l’usine. “Ici c’est les cadres que nous recevons directement d’Asie ; ils sont nus et attendent d’être assemblés” nous disait notre hôte du jour. Les cadres étaient très nombreux, par milliers. Au centre de l’usine, les composants de vos vélos. Freins, câbles, blocs moteur, consoles, poignés, cintres… Bref les 200 et quelques pièces qui font qu’un cadre, une fois monté et assemblé devient vélo.
Dans l’usine, à l’opposé des cadres en attente, la zone d’expédition des vélos assemblés. Sauf que cette zone est devenue une zone de stockage, tampon. Par centaine des vélos assemblés, montés, soigneusement glissés dans leur carton respectifs. Sur chaque carton, un autocollant avec la mention “en attente batterie“.
Donc nous voilà avec des vélos prêts à partir. Presque prêts. Parce qu’un vélo électrique s’il est livré sans sa batterie présente peu d’intérêt (et il ne peut pas sortir de l’usine). On vous en parle régulièrement, la production de batteries est très gourmande en métaux rares. Et comme tout le monde met de la batterie dans tout et n’importe quoi (la chaussette connectée, vous connaissez ?), la demande en métaux rares explose. Et comme, au hasard, l’industrie automobile combinée à celle de la chaussette connectée commande un peu plus que l’industrie vélo, l’approvisionnement en matières premières est tendu. Faut attendre son tour.
Conclusion sur l’indice 2
Ces centaines de vélos qui restent en stock dans l’usine parce qu’il leur manque la batterie seraient déjà entrain de sillonner nos routes et nos chemins s’ils avaient été des vélos mécaniques. Ça, c’est la théorie. Parce qu’en vrai, ces centaines de VAE, ils n’auraient peut-être pas été vendus s’ils n’avaient été que de vulgaires vélos acoustiques. Auraient-ils été commandés si les acquéreurs avaient anticipé de tels délais ? De telles augmentations du prix de l’électricité ? De telles tensions sur la production de l’énergie ? Nous n’avons pas la réponse à cette question. Parce qu’avec des si, vous savez tout ce qu’on peut faire.
Indice 3 : Pénurie de composants vélos
Quel rapport Bob ? Nous direz-vous spontanément. Et bien, nous vous invitons à relire ce billet sur l’éco-pédalage. Le VAE c’est super. Le gros défaut quand même du vélo électrique, c’est l’usure prématurée de l’ensemble des composants, des consommables comme on dit. A l’accélération assistée, les contraintes sont plus fortes sur l’ensemble de la transmission (plateaux, chaine, pignons) ; sur les pneumatiques aussi.
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Puisqu’on va plus vite plus vite on est aussi souvent amené à freiner plus fort et plus souvent. Bonjour l’usure des plaquettes de freins. Bonjour l’usure des pneus aussi. Amusez-vous à faire le calcul de comparaison de votre budget consommables sur 5000 kilomètres en VAE et la même distance sur un vélo musculaire. Au-delà du budget, on y vient après, anticipez l’achat de votre cassette arrière. Ce serait ballot d’attendre 6 mois avant de pouvoir remettre votre VAE en état.
Conclusion sur l’indice 3
La pénurie de composants ne touche pas que les industriels et ce qu’on appelle les premières montes. Elle concerne toute la chaîne d’approvisionnement et bien entendu le marché du SAV. Vous connaissez l’adage cher à Stevenson, qui veut voyager loin ménage sa Modestine. Votre Modestine a vous, elle a tout intérêt à être musculaire. Un bon vieux mulet4 en somme, ça ne s’invente pas.
Indice 4 : Pouvoir d’achat et inflation
On va aller vite sur cet indice. Il suffit de se rendre chez un vélociste et écouter les personnes qui s’intéressent au vélo à assistance électrique. “Ah ouais, c’est 3000€, quand même. Bah en fait c’est mon budget vacances, donc et bien je vais partir en vacances et puis j’aviserai à la rentrée“.
Pendant les mois qui viennent de passer, il y a eu la pandémie. Il n’y avait pas de sollicitations externes. Les frontières étaient fermées, les avions cloués au sol, les restaurants, les lieux de culture, les magasins tout cela étaient fermés. Pas de tentation d’aller dépenser de l’argent ailleurs. Pas ou peu de déplacement en voiture aussi. Les vélocistes eux étaient considérés comme commerces essentiels. Le vélo était considéré comme geste barrière. La belle aubaine. Tout le monde a voulu son vélo. L’arbitrage du budget des ménages était simple.
Si on parle d’inflation, on peut aussi parler du cours des matières premières agricoles. Au hasard, le blé. Le cours du blé tendre rendu à Rouen en juin 2020 valait 179€/tonne ; en juin 2021 209€/tonne ; en juin 2022 il tourne autour des 400€ la tonne. Le blé tendre, c’est pour faire votre pain. Le cours du blé dur (pour faire les pâtes) au 15 juillet 2021 il était à 285€/tonne, un an après il tourne autour des 475€/tonne.
Conclusion de l’indice 4
Pain, pâtes, VAE ou vélo, on va voir ce qui est véritablement essentiel.
Indice 5 : Le vélo est souvent (toujours) la solution aux crises
“Début des années 70, les hollandais ne voient pas la lumière parce qu’ils sont plus en avance que nous autres. Ils sont juste dans la mouise.”
L’indice 5 est simplement une observation. Le vélo est un cycle. Il a toujours été une solution pendant les crises. On oublie souvent de vous raconter cet aspect dans le storytelling hollandais. D’où vient le succès (et l’avance) de la petite reine là-bas ? Début des années 70, les hollandais ne voient pas la lumière parce qu’ils sont plus en avance que nous autres. Ils sont juste dans la mouise. Des positions pro-israéliennes leur rendent un accès limité aux barils venant des pays comme l’Arabie Saoudite. Le choc pétrolier de 1973 est vécu d’une manière bien plus violente que chez nous. Solution ? Le vélo.
Même époque, Copenhague. Un projet d’autoroute urbaine est dans les tuyaux. C’est la crise pétrolière. L’autoroute coûte trop cher. Solution ? Des pistes cyclables. Plus tôt. Sortie de guerre 39/45. Un pays, des usines à reconstruire. Les ouvriers Renault vont au boulot, à vélo. Plus proche de nous. 1995, grandes grèves des transports publics. Solution ? Le vélo. 2019. On reprend les mêmes et on recommence. Pandémie COVID-19. Solution pour se déplacer sans respirer l’air des autres ? Le vélo.
Conclusion de l’indice 5
Le vélo est une solution aux crises. On parle bien du vélo pas du VAE. Le principe d’une crise c’est qu’elle est normalement limitée dans le temps. L’expression “Solutions pour une sortie de crise” est servie à tout va. Ce billet était écrit le 12 juillet, nous entrions de plein pied dans une canicule en France, dont les experts ne peuvent que dire “sans précédent depuis la canicule de 2003“.
On est au début d’une bonne grosse crise. Et celle-ci est prévue pour durer. C’est la crise climatique. Le VAE est une réponse partielle à cette crise que nous sommes entrain de vivre. Si le VAE est bien plus vertueux que la voiture électrique (il fallait quand même le préciser), le vélo est autrement plus vertueux que le VAE5.
Le vélo est bien l’avenir du VAE
Sur la base de ses faits et démonstrations. Un bon vélo est 3 fois moins cher qu’un VAE moyen. Il est plus économe en composants. Sa mise en mouvement ne dépend pas du prix (et de la disponibilité) de l’énergie. Le vélo est le strict essentiel. Un moteur et une batterie ne sont pas essentiels. La crise est le ressort du vélo. Nous avons un lot de crises qui se profilent devant nous. L’avenir du VAE sera le vélo.
Nous vous rappelons quand même, nous parlions d’emobilitygate en janvier 2022. Déjà. En annonçant que la mobilité électrique est un mirage écologique. Qu’un jour ou l’autre, ça nous pètera à la gueule. A l’époque nous ne le disions pas aussi clairement. Avec tous ces faisceaux d’indices, nous pouvons désormais le dire. Nous aurions aimé nous trompés. L’article en question est là ci-dessous.